(Photo LOF - Adelaïde Labille-Guiard, portrait de femme 1778 sans son verre dans l'atelier de Dominique Le Marrois)
Adélaïde Labille, épouse Guiard, est techniquement, humainement, socialement un reflet du profond changement des 20 ans qui précèdent le révolution française.
On voit s’enfoncer dans le souvenir la créativité des grands anciens (Perronneau, La Tour), disparaître l’insouciante de l’époque Louis XV, et sur un fond de préromantisme nostalgique (apogée de l’école anglaise du pastel) arriver, avec le sérieux et la technicité bourgeois, les derniers jours de l’art léger du pastel.
Adelaide Labille est une vraie pastelliste, de formation et de savoir faire.
La Tour en fait la formation (de 1769 à 1774) et la destine à son école ce qui en dit long sur ses qualités. Elle est justement placée par Ratouis de Limay "largement au dessus de Vigée Le Brun" à qui on la compare souvent.
Elle travaille avec attention, ses pastels sont peu nombreux ( il en est passé 9 en vente depuis 15 ans) et soignés. Vers la trentaine elle apprendra l’huile en vue d’entrer à l’Académie royale, technique qu’elle pratique pour les grands portraits de cour, mais elle restera toujours fidèle au pastel.
La technicité consiste en une maîtrise parfaite du rendu des matières (les étoffes, les voiles, les cheveux, la peau etc) où elle rejoint le plus grand (Mengs), de la mise en page et de la ressemblance (Lenoir, Cotes…).
Dominique Le Marrois, restaurateur de pastel parisien qui en a vu beaucoup et de très bons, a nettoyé le portrait ovale de femme 1778. Il a pris des gros plans et me disait qu’il n’avait jamais vu une peau aussi «palpable».
Rendre le vivant de la peau est un travail laborieux.
On peut, comme en photo, forcer le contraste pour simplifier l’effet, mais rendre cette sensation de vie à travers la peau est le résultat d’une minutieuse reproduction de transparences, de nuances qui exigent du temps et de l’observation. Adélaïde a cette qualité d’un travail patient sans pour autant diluer une vraie personnalité ni la spontanéité nécessaire du pastel.
Cette remarquable capacité résulte d’une seconde influence : celle de la miniature dont la mode va croissante. Miniaturiste également (son second maitre et second mari François-André Vincent est miniaturiste de formation), elle a appris le détail et le fondu. La rencontre de la minutie, de la technicité et d’une vraie personnalité donne naissance à un style achevé, qui comme dans le mobilier est un moment de perfection.
Bien qu’il n’existe ni littérature sérieuse ni commémoration, Adélaïde a conservé une notoriété. On trouve une iconographie non négligeable sur le net, et une notoriété hors de France. LOF veut lui rendre l’hommage qu’elle mérite.
(Photo Guetty - Délicieuse surprise par Adelaïde Labille-Guiard - Remarquable carnation, une peau à effleurer, belle lumière de la boucle d'oreille et des dents)
La sensibilité d’Adélaïde Labille est-elle sensuelle ?
La délicieuse surprise qui est maintenant au Guetty est une exception.
Les cheveux sont parfaitement rendus, la peau est présente, attirante, d’une carnation détaillée mais la posture est d’une époque finissante.
Est-ce un portrait ? quelqu’un a posé mais c'est d'avantage un modèle d'atelier qu'un portrait. Il est de 1779, période intermédiare pendant laquelle d’Adélaïde évolue vers le style nouveau auquel elle apporte une contribution décisive.
Elle s’éloigne de l’influence de Latour et elle n’est pas encore entrée à l’académie.
Bien avant 30 ans Adélaïde a déjà un style de portrait affirmé : elle expose des portraits à l’académie Saint Luc depuis l’age de 25 ans (74).
(Photo Christies - Lot 318 Paris 21-03-2002 : Adelaïde Labille-Guiard 1775 : Madame Poisson, mère de la Pompadour (?) sur 5 feuilles 70,3x56,5cm. Le sourir, l'expression et la vigueur de La Tour sur le visage, le détail, la sensibilité dans les matières)
Chance, deux grands ovales de cette période ont été vendus recemment :
- Le portrait de présumé de Madame Poisson – mère de la Pompadour - vendu chez Christies Paris en 02/2002 date de 1775 ( 26 ans) est instructif sur les débuts d’Adélaïde et l’évolution ambiante : le sourir la vigueur du trait sont de La Tour, le rendu de la peau et le travail d’étoffe sont d’Adélaïde.
- Le portrait de femme daté de 1778 de la vente Sotheby’s Pairs 06/2002 qui confirme la lente maturation de la personnalité concommitante à la naissance d’un style nouveau : le sourir est plus discret, incroyable technicité de la peau et des tissus, le regard prend du sérieux. (Ce pastel a été acquis par la collection LOF).
(Photo LOF - détail du portrait ovale de 78 : en pleine période de transistion naissance d'une nouvelle manière et d'une nouvelle époque)
L’essentiel de l’œuvre conservée d’Adélaïde est postérieure à son entrée à l’académie royale, période de maturité.
Le sourir disparaît des lévres de Flore Pajou, le cadrage du portrait de Robespierre est devenu moderne, les ambiances sont distanciées.
(Photo RMN - Louvre - Adelaïde Labille-Guiard 1783: Flore Pajou (1764-1841) à 18 ans, épouse Claudion en 1781 - 66x55cm. Ce pastel date de l'année de son entrée à l'Académie. Le style atteint sa maturité : merveilleuse technicité, mais le sourir a disparu)
Les deux pastels de 1775 et 78 sont intéressants car ils sont d’un temps ou tout change.
La jeunesse d’Adélaïde nous entraine progressivement loin de la spontanéité d’avant 60, de la suavité italienne ou de l’expressivité anglaise.
Sa démarche est au cœur de la naissance d’un style nouveau de portrait porteur de modernité. C’est pourquoi, grâce à elle, la fin du siècle du portrait est aussi passionante que le début.
(Photo RMN - Versailles - Pierre Roch Vigneron - huile - Maximilien de Robespierre (1758-1794) copie du pastel d'Adélaïde Labille-Guiard exposé au Salon de 1791 : modernité du cadrage, de la lumière, de l'expression. Autre temps)
Lire en suite de note le chapitre que Ratouis de Limay lui consacre
P. Ratouis de Limay - Le pastel en France au XVIII° siècle
CHAPITRE VI - Femmes pastellistes
Madame LABILLE GUIARD (1749 1803) Madame Labille Guiard est sans contredit la plus grande figure féminine du pastel français au XVIII° siècle. Entre elle et Madame Vigée Le Brun, il exista une rivalité analogue à celle qui sépara Perronneau de La Tour. Forte des appuis de la Cour, sachant à merveille tirer parti de la séduction de son talent, Madame Le Brun parvint à éclipser partiellement une rivale moins sémillante, moins adulée mais dont le talent, comme pastelliste, était de beaucoup supérieur au sien.
Adélaïde Labille, fille d'un marchand mercier, naquit à Paris le 11 avril 1749. Très jeune, elle fréquenta les ateliers d'artistes. Son premier maître fut un miniaturiste, François Elie Vincent, professeur à l'Académie de Saint Luc , aussi ses premières oeuvres furent-elles des miniatures. (Dans son ouvrage sur la Miniature française, Henri Bouehot signale de Mme Labille Guiard une miniature appartenant à M. Fitz Henry « représentant un portrait d'homme grand comme un chaton de bague, qui est bien ce que l'art spécial du miniaturiste a laissé de plus parfait, même vis à vis de Drouais »)
Désireuse d'orienter son talent du côté du pastel, elle demanda, dit on, à La Tour la permission de le voir travailler : « Elle en obtint beaucoup plus, écrit Joachim Lebreton (Notice publiée dans les Nouvelles des Arts de Landon). Il s'y intéressa comme à une élève qui devait honorer son école. Ses ouvrages au pastel la rendirent recommandable aux artistes du premier ordre. »
Il est assez difficile de déterminer quelle fut l'influence de La Tour dans la formation de son talent et quelle fut celle du peintre Vincent. A La Tour, elle pourrait, en toute vraisemblance, devoir ces qualités viriles de dessin et de modelé que révèlent la plupart de ses pastels, qualités qui n'excluent pas chez elle une fraîcheur de coloris des plus séduisantes. On a prétendu, sans preuves décisives d'ailleurs, qu'elle avait collaboré à des oeuvres de La Tour. (Adélaïde Labille Guiard (1749 1801), par le baron Portalis. Gazette des Beaux Arts, 1901.)
Le 23 août 1769, Adélaïde Labille épousait Nicolas Guiard, commis à la Recette générale du clergé de France. Agréée de l'Académie de Saint Luc, « Mademoiselle La Bille, épouse de M. Guyard » exposait, en 1774, au Salon de cette Académie, « le portrait d'un magistrat, peint au pastel, de grandeur naturelle ».
Au même Salon, Mme Vigée Le Brun était représentée non seulement par un pastel mais par une peinture à l'huile. Rendant compte de cette exposition, un critique écrivait (Lettre à M. le marquis de ** sur les peintures et sculpture & exposées à l'hôtel de Jabac en 1774 pair M. J.... op. cit) :
« Mademoiselle La Bille, épouse de M. Guiard, a exposé très peu de portraits mais ce peu est d'une touche très hardie et d'une couleur vraie; les plans en sont bien sentis, les lumières larges et bien dégradées; il n'y a ni contour ni touche dure; on voit que son but est de mettre tout l'effet dans les lumières. Ce parti est le plus agréable mais n'est pas le meilleur. Elle sacrifie trop ses ombres, ce qui ôte de la vigueur surtout à ses têtes d'homme; elle réussit mieux dans les femmes; ses cheveux et ses habillemens sont touchés avec esprit et goût; ses fonds sont trop vagues; ils manquent de corps et de vigueur, ce qui nuit à l'effet de ses portraits... »
Aux expositions de la Correspondance, Mme Labille Guïard faisait, en 1782, de nombreux envois de pastels : d'abord un portrait du comte de Clermont Tonnerre, « grandeur de nature, vu à mi corps, en uniforme, le casque sur la tête, la main appuyée sur la garde de son épée », portrait dont le Journal de la République des Lettres et des Arts, se faisant l'écho de jugements portés par « des artistes de la première, classe », vantait non seulement la ressemblance mais encore « une harmonie soutenue dans un ton vigoureux, joint à une exécution mâle et ferme, bien rare dans ce genre de peinture. »
Aux visiteurs des expositions de la Correspondance, Mme Labille Guiard montrait encore les portraits de Voiriot et de Vincent (pl. XLii, 63), de Bachelier (Les portraits de Vincent et de Bachelier sont aujourd'hui au musée du Louvre voir le site ) et son propre portrait « si frappant que des battements de mains redoublés se sont fait entendre généralement lorsque Mme Guiard a paru à l'Assemblée (Assemblée ordinaire des Savants et des Artistes du 13 juin 1782) », et « une Cléopâtre, vue à mi corps, grandeur de nature (Le baron Portalis signale une Tête de Cléopâtre par Mme Labille Guiard, passée à la vente Féral. Il reconnut le portrait de Mme Guiarci par elle même dans un portrait qui, à la vente Hope, était donné comme étant celui de Mme Vigée Le Brun. (Pl. XLTI, 62),) ».
Mme Labille Guiard, comme Mme Vigée Le Brun, songeait à l'Académie royale.
Les règlements en vigueur prescrivant la présentation d'un portrait à l'huile, elle demanda à François André Vincent, fils de son premier maître, qui revenait de Rome de lui apprendre le maniement des pinceaux et de la palette.
Il n'en fallut pas davantage pour qu'on la soupçonnât de faire retoucher ses oeuvres par lui. A propos du portrait au pastel du peintre Vien (Gravé par Miger) qui figurait à l'exposition de la Correspondance de janvier 1783, les Nouvelles de la République des Lettres et des Arts relevaient ainsi cette accusation : « Nous félicitons Mde Guyard de la confiance que des hommes aussi distingués témoignent en ses talents; elle détruit bien complettement la fausse opinion que l'envie ou l'ignorance s'étoit empressée de répandre dans le public, que le mérite de ses ouvrages étoit dû à une main étrangère; nous esperons encore des nouvelles preuves de la solidité de son talent, par le portrait de M. Pajou, représenté modelant celui de M. Lemoine. Il nous reste à présenter à Mde Guyard les vœux du public pour lui devoir le Portrait du célèbre Latour dont elle est l'élève et sur les traces duquel elle marche avec tant de succès; on retrouve de plus en plus dans ses productions cette expression et cette vérité qui, portées au plus haut point par son maître, lui donnent les droits à l'immortalité. »
Quelques semaines plus tard, le Salon de la Correspondance avait la primeur du portrait de Pajou modelant le buste de Lemoyne, ainsi que d'un grand pastel représentant : « un homme de grandeur de nature, vu dans son cabinet, près d'un. bureau sur lequel il est appuyé tenant un livre ouvert ».
Le fait d'avoir pris pour modèles plusieurs académiciens comme Vien, Beaufort, Voiriot, Pajou, Bachelier était bien de nature à la justifier auprès de l'Académie de l'intégrité de son talent. Le 31 mai 1783, la « demoiselle Adélaïde Labille des Vertus » et Mme Vîgée Le Brun étaient, dans la même séance, agréées et reçues de l'Académie royale.
La note suivante du Directeur Général des Bâtiments (Archives Nationales. Maison du Roi. Direction des Bâtiments. Académies. Beaux Arts. 1742 1791. Carton 01 1.073) montre dans quelles conditions très différentes ces deux admissions furent prononcées .
« Admission de dames à l'Académie 1° Juin 1783.
« Votre Majesté ayant approuvé le contenu du Mémoire que je pris la liberté de lui mettre sous les yeux, relativement à la De Le Brun, j'en envoyai l'ampliation à l'Académie Royale de Peinture qui, dans son Assemblée d'hier, s'est empressée à témoigner sa soumission aux désirs de la Reine en recevant tout de suite la Dame Le Brun, sans la soumettre aux épreuves ordinaires, attendu la connaissance qu'on avoit de son talent.
« Dans la même Assemblée, l'Académie a examiné les ouvrages d'une autre femme (La Dame Guyard) qui a beaucoup de talent; elle l'a d'abord agréée et sur le vu d'un nouveau Tableau, elle l'a admise, sauf l'approbation de Votre Majesté, au nombre des Académiciens, ce qui remplit le nombre de quatre auquel Votre Majesté a jugé à propos de fixer celui des femmes dans l'Académie.
« Je supplie'votre Majesté de vouloir bien accorder la confirmation à ces réceptions. »
De Madame Labille Guiard, l'Académie avait retenu, comme premier morceau de réception, ce solide et vivant portrait de Pajou modelant le buste de Lemoyne, qui tient vaillamment sa place au musée du Louvre, à côté des oeuvres de La Tour et de Perronneau (pl. XLV, 67). Son deuxième morceau de réception, exécuté plus tard, était une peinture à l'huile, le portrait du peintre Amédée van Loo La nouvelle académicienne ne manquait pas de profiter largement, dès l'année 1783, de son droit d'exposer au Salon du Louvre; elle n'envoyait pas moins de huit portraits dont sept pastels, parmi lesquels celui de Pajou (C'est vraisemblablement pour témoigner sa gratitude à sa portraitiste que Pajou exécuta, l'année suivante, le buste de son père, Claude Edme Labille qui figura au Salon de 1785.) et un portrait de l'acteur Brizard dans le rôle du roi Lear (qui est aujourd’hui à l’Odéon)
(Ce portrait avait été commandé par la comtesse d'Angiviller. L'auteur de la brochure : « La critique est aisée mais l’art est difficile » le tenait pour un chef-d’oeuvrc de composition et d'exécution.)
Le portrait de Pajou obtenait à bon droit presque tous les suffrages : « Mais venez voir le chef-d’œuvre des Portraits et de Madame Guyard, l'Elève reconnoissant qui modèle le portrait de son Maître (no 125), s'écrie l'Anglais. (Les peintres votants ou dialogues, entre un François et un Anglois sur les tableaux exposés au Salon du Louvre en 1783.) Quelle physionomie mâle et parlante! Comme ce bras nud correctement dessiné, paroît de relief et sortir de la toile! »
L'Année Littéraire n'est pas moins élogieuse : « Il est plus d'une route pour arriver à la célébrité lors qu'on prend la nature pour guide et qu'on sait la reproduire avec autant de succès que Madame Guiard. Les portraits de MM. Vien, Pajou, Bachelier, Beaufort avaient fait connaître cette artiste d'une manière avantageuse et lui avaient concilié tous les suffrages avant même que l'Académie eût couronné ses talents en la recevant au nombre de ses membres; on peut ajouter aux portraits que nous venons de citer ceux de MM. Voiriot, Suvée et Gois; ce dernier est peint à l'huile, tous les autres sont au pastel et tous réunissent à la plus parfaite ressemblance un dessin correct, une touche moelleuse et ferme, un ton de couleur piquant et vrai. Ne croiés pas, Monsieur, que ces Portraits ainsi que tant d'autres, offrent une attitude roide, contrainte, qui annonce l'ennui du modèle et la fatigue de l'artiste; dans ceux de Madame Guiard, on s'imagine converser avec les personnes dont elle offre l'image fidelle, par le ton d'aisance et la facilité qu'on y remarque. On devine en quelque sorte l'esprit et le caractère de chacun de ses modelés : l’âme semble peinte sur le visage. »
Cependant, des jalousies s'éveillaient, et un libelle dirigé non seulement contre Mme Guiard mais contre Mmes Vallayer Coster et Vigée Le Brun, circulait non sans soulever une certaine émotion.
Craignant de ne pas obtenir du lieutenant de police l'imprimatur, l'auteur en avait fait graver le texte. (Jules Guiffrey Notes et documents inédits sur les, expositions du xviir siècle. Paris, J. Baur, 1873.)
Profondément indignée d'attaques calomnieuses qui visaient non seulement son talent mais sa vie privée, Mme Labille Guiard écrivit à la comtesse d'Angiviller cette supplique dont le style naïf, le ton lamentable et l'orthographe rudimentaire évoquent les lettres de Perronneau (Maison du Roi) :
« Madame la Comtesse, Il 19 7bre 1783.
« Les bontés dont vous m'honoré me rassure sur la crainte de vous importuner en vous priant de vouloir bien employer votre crédit et l'autorité de Monsieur le Comte pour arrêter un libel afreux; je compte que l'intérêt que vous prenez à Mle Coster ( M me Vallayer Goster (1744,1818) reçue en 1770 de l'Académie royale de peinture.) et à votre sexe en général ira à l'apui de ma demande; des trois maltraités je suis la plus, je ne sais si ces dames connoissent cette calomnie, le hasard m'a procuré une des pre qui se soye vendu, un curé d'Estamp (ville où mon père est retiré) sachant que mon père désire toute les critiques aprends qu'il y en a deux nouvelles, les achettes et voyant qu'il a le temp de me les faire lire me les envoyé par une amie, s'il eut eu ces écrits 4 heu. plus tard, il les portait à mon père en arrivant; juge, Madame, des chagrins d'un homme de 81 à qui il ne reste plus qu'une fille de 8 enfant, qui se console de toutes ses pertes par le peu de réputation qu'elle a et surtout par l'estime dont elle joui; voyez le lizant avec avidité, s'attendant à voir critiquer ou louer ses ouvrages et voyant un libel horrible.
On est fait à en voir sur les grands mais un simple particulier voir que sa fille en cherchant un peu de gloire perd sa réputation quelle est chanté, cela est cruel...
Si l'auteur eu dit seulement que mes ouvrages n'étoit pas de moi les Portrait de M. Pajou, Vien, Bachelier, Beaufort, Gois, et les autres répondois pour moi, mais en attaquant les mœurs il donne de la valeur et au moins cela reste.
« ... J'espère donc de vos bontés pour moi que vous voudrai bien employé promtement les moyens que votre zele à rendre service vous suggérera pour areter la vente, cela dependerois de M. Le Noir entièrement si cela ne se vendois pas au Louvre mais cela depent de M. Chaulot... »
Quelques jours après, le distributeur du pamphlet était arrêté, les exemplaires saisis. On soupçonna un nommé Gorsas d'en avoir été l'auteur, et, qui plus est, sur l'instigation même du mari de l'artiste.
Au Salon de 1785, Mme Labille Guiard envoyait plus de peintures à l'huile que de pastels.
« Une Femme », auteur de « l'Avis important sur le Sallon dte 1785 » écrivait : « C'est un homme que cette femme là, entends je dire sans cesse à mon oreille. Quelle fermeté dans son faire, quelle décision dans son ton et quelles connoissances des effets, de la perspective des corps, du jeu des grouppes et enfin de toutes les parties de son art! C'est un homme, il y a quelque chose là dessous; c'est un homme. Comme si mon sexe étoit éternellement condamné à la médiocrité et ses ouvrages à porter toujours le cachet de sa débilité et de son antique ignorance ! »
Faire des portraits d'artistes était peut être plus honorifique que rémunérateur.
Une lettre de la Correspondance générale de la Maison du Roi, en date du 8 novembre 1785, (Arch. Nat O1 1918) montre Mme Labille Guiard dans une situation voisine de la misère :
« Parmi les peintres de l'Académie dont les ouvrages ont obtenu dans l'esprit du public connoisseur la pluralité des suffrages, on peut ranger la Dame Guyard dont un tableau surtout a été regardé comme digne des plus grands maîtres de l'école française sçavoir celui qui la représente occupée à peindre pendant que deux de ses élevés considèrent avec attention son ouvrage.
« La Dame Guyard, malgré ce talent extrêmement distingué est sans aucune fortune et même très peu occupée. Cette double circonstance, celle d'une femme dont le talent égale celui des meilleures peintres de l'Académie et celle du peu d'aisance dont elle jouit me met dans le cas de proposer à Votre Majesté de lui accorder une pension qui l'aide à subsister et à exercer un talent qui fait honneur à l'Academie et à la France... Madame Adélaïde m'a témoigné prendre un intérêt particulier au succez de cette demande. » T
rois études au pastel représentaient Mme Labîlle Guîard au Salon de 1787, l'une de Madame Victoire « pour faire le pendant du portrait de Madame Adélaïde », les deux autres du vicomte et de la vicomtesse de Gand.
Le Mercure de France, particulièrement malveillant, déplore, dans ses pastels, « une manière molle et dénuée de tout effet », et reprend en quelque sorte à son compte les accusations du pamphlet condamné en écrivant que « sans le témoignage du livret, on serait tenté de prendre les portraits de Madame Adélaïde et de Madame Elisabeth pour des oeuvres de Vincent.
L'Année Littéraire préfère les peintures à l'huile de Mme Guiard à ses pastels, tout en reconnaissant que les trois études exposées dénotent « beaucoup d'esprit et de facilité ». Les portraits de Mesdames Adélaïde et Victoire valurent à leur auteur le titre de peintre de Mesdames Le brevet lui conférant cet honneur la désignait sous le nom de Labille des Vertus « femme séparée quant au bien de Nicolas Guiard, premier commis du clergé de France ».
Dans son Journal, Wille raconte quelle part active Madame Guiard prit aux discussions de l'Académie royale, combattant avec talent, aux côtés de Vincent, de Moreau le jeune, de Miger, des règlements qu'elle trouvait surannés.
Elle rallia la majorité des voix pour faire décider non seulement que le nombre des femmes artistes académiciennes ne serait plus limité à quatre, mais encore que celles ci pourraient, à l'avenir, prétendre au titre de Conseiller.
A la Révolution, Mme Labille Guiard dut, comme beaucoup d'autres artistes, se tourner vers les maîtres de l'heure pour assurer son existence.
En 1791, parmi les 794 oeuvres figurant au Salon, nous avons relevé des portraits au pastel, par Mme Labille Guiard, de Talleyrand Périgord, de d'Aiguillon, de Lameth, de Dupont et de Beaubarnots, députés à l'Assemblée nationale. « Il paroît, écrit un « citoyen patriote et véridique », que Madame Guyard va peindre tous nos députés. Ils ne peuvent mieux s'adresser. »
A ce même Salon, elle exposait un portrait de Robespierre. (Boze en exposait un également)
« Il me semble, écrit la Béquille de Voltaire au Salon que tous vos portraits de députés sont au pastel. Auriez vous par hasard mesuré leur gloire à l'éclat fugitif de ces couleurs? Ah ! peignez nous Robespierre à l'huile! »
Robespierre avait d'ailleurs accepté de fort bonne grâce de poser devant la pastelliste. « On m'a dit, lui écrivait il le 13 février 1791, que les Grâces vouloient faire mon portrait. Je serois trop heureux d'une telle faveur, si je n'en avois senti tout le prix. Cependant, puisqu'un surcroît d'embarras et d'affaires, ou puisqu'un Dieu jaloux ne m'a pas permis de leur témoigner jusques ici tout mon empressement, il faut que mes excuses précèdent les hommages que je leur dois. »
« Les Grâces » n'eurent pas, cette année là, une bonne presse. On lit dans une brochure anonyme :
« Madame Guyard attache sa réputation à celle des grands hommes de notre siècle. Il est à craindre que la médiocrité de son talent ne les fasse pas passer à la postérité. Ceux qui veulent juger de son mérite, et où elle s'est surpassée dans ce qu'elle a fait de mieux, n'ont qu'à étudier le n° 15, M. d'Aiguillon. Ses numéros 10, 34, 40, 81, 329, 247 et 739 sont plus ou moins secs, de ton rouge, crû et trop ardent. Malgré tous ses talens, on la dit très active. Quatorze départemens lui assurent le consentement de tous les autres pour faire la Famille Royale où l'on verra le Roi remettant la Constitution au Dauphin. Elle se prépare de grands travaux et elle sera obligée de soigner la santé de M. Vincent qui est fort délicate et qu'elle surcharge d'un genre qui lui appauvriroit son talent. »
Mme Labille Guiard eut un grand nombre d'élèves, parmi lesquelles Mlles Capet, Alexandre, Rosemond, Verrier, Le Roux de la Ville.
Neuf d'entre elles exposaient, en 1783, à la place Dauphine, peintures ou pastels. Parmi les pastels de Mme Guiard connus de lui, le baron Portalis a cité dans son étude de la Gazette des Beaux Arts, un portrait du Père Ruffin, supérieur des Théatins, daté de 1780, des portraits du comte de Saint Simon, l'ami de Talleyrand, oeuvre signée, exécutée pendant la Révolution, et de la princesse de Montléar. (Un pastel, représentant un chevalier de Saint Louis, signé et daté de 1776, figurait, en 1929, à l'Exposition de Rouen (n* 136). Dans une collection parisienne, nous avons eu l’occasion de voir un beau portrait au pastel de Mme Mitoire, fille de Carle van Loo, avec ses deux enfants. Ce pastel était passé, le 16 mai 1927, à la vente Hodgkins. (Pl. XLIII, 64).
Les dernières années de Mme Labille Guiard furent embrumées de tristesse.
Le 12 mai 1793, elle divorçait.
Tandis que Mme Vigée Le Brun émigrait et faisait à l'étranger de fructueuses tournées, Mme Guiard se trouvait aux prises avec des difficultés de toutes sortes, en grande partie causées par les événements.
Le 8 juin 1800, elle épousait François André Vincent, le compagnon fidèle de ses mauvais jours; elle mourait le 24 avril 1803. Ses oeuvres tombèrent dans le discrédit commun à tous les artistes du XVIII° siècle.
C'est ainsi que le portrait au pastel de Vien, vendu en 1816, après la mort de Vincent, ne dépassait pas 38 francs. Mais, tandis qu'à la fin du XIXe siècle, et au début du XXe, les connaisseurs et le public prononçaient une juste et progressive réhabilitation des pastels de La Tour, de Perronneau, de Ducreux, Mme Labille Guiard était laissée par eux dans la classe des petits maîtres.
Fort à propos, les conservateurs du Louvre ont remis en honneur des pastels de Mme Labille Guiard, comme ceux de Vincent et de Bachelier, depuis longtemps non exposés et qui, avec le portrait de Pajou, décèlent une maîtrise dans le dessin, une richesse et une harmonie délicate de la couleur qui assignent, croyons nous, à leur auteur une place légitime parmi les maîtres pastellistes du XVIII° siècle.
Quelle somme!
Et ce n'est que le Adélaïde Labille-Guiard (1)...
J'ai suivi avec passion les péripéties de la dame qui ne s'est pas fait que des amis, à commencer par son mari. Condition humaine?
Sans toi et ta passion, on ne saurait rien du pastel.
Quitte à être trivial, je serais tenté de paraphraser une publicité notoire:
"Avant, vous n'aviez jamais goûté de pastels"...
Chaudes félicitations d'un soi-disant peintre qui ne savait rien du pastel, à part Le Maréchal de Saxe et le portrait de femme d'Antoine Vestier. Mais cette dernière, c'est un fantasme personnel, je n'ai pas de mérite.
Rédigé par : JCP | 01 mars 2005 à 14:11
C'est très réaliste et certain(e)s n'en sortent pas arrangés! (rires)
Rédigé par : Elvira | 28 avril 2005 à 01:58
Dans l'inventaire des tableaux attribués à CARL VAN LOO, je recherche ue peinture sur toile
intitulé la femme écrivain pour sa date de réalisation.
Rédigé par : MOLLARET | 03 décembre 2005 à 08:26
j aimerait savoir si cette dame et t une de mes descendente direct?
Rédigé par : labille frederic | 28 mars 2007 à 10:35
hello, I happen to have a picture of a woman and I think it comes from a book page. It says "au moins soyes discret", and at the bottom it says, "defsine et grave apr aug de st aubin, de l'academie royale de peinture et sculpture graveur du roi et de sa bibliotheque". I dont speak french so I am having a hard time doing research of this picture.if you can help, please e-mail me at [email protected]
Rédigé par : janette guerrero | 24 avril 2007 à 16:32