La cuisine du jardin

Haricot de Lima (strié)

(Photo LOF - Haricots de Lima secs)

La mère d’Ann, Lamar McCaw, était de Géorgie, elle cuisinait de temps à autres des Lima Beans, haricots de Lima verts, haricots de climat chaud qu’elle aimait bien.
Ann et ses frères et sœurs s’en souviennent comme de la nourriture la plus horrible de toutes.
Il s’agit d’un haricot vivace, une des 4 espèces de phaseolus cultivée, dont il existe de nombreux cultivars, souvent décrit comme doux, fondant, etc.
Dès leur introduction en climat méditerranéen (il y a 150 ans) les grainetiers en ont chanté une louange de vendeur "les plus délicats, tout à fait supérieurs à la plupart des variétés communes de haricots" (Catalogue des graines au Hamma Alger 1862)
Même Désiré Bois recommande la variétés blanche "très recherchée en Angleterre" (Butter bean)

(Photo LOF - Haricots de Lima détrempés, avant cuisson)

Nous avons testé en frais et en sec une variété proche de Speckled strié bordeaux :
la peau est épaisse, pas fondante du tout, la chair n’est pas spécialement sucrée, la durée cuisson doit être précise et brève pour obtenir un plat mangeable.
Après trempage d'une nuit, le haricot de Lima cuit en 7 minutes d’ébullition, goûter à partir de 5 minutes.
Passé le moment idéal, la chair est farineuse, y compris dans la paella.
Davantage encore que p. vulgaris en grain, le haricot de Lima est une véritable éponge à saveur.
Cuit dans un bouillon condimenté (par exemple le bouillon d’une saucisse fumée), il prend fortement le goût du bouillon, lui-même n’ayant presque pas de goût, il ne reste de ce haricot qu’une texture.
Bref, comme le dit Charles Bailly de Merlieux,dans sa Maison rustique du 19e siècle "ce haricot est remarquable pour la qualité farineuse de son grain mais il est peu délicat"

(Photo LOF - on ne sait pas par qui et quand ce haricot fut introduit en France, c’était début XIX°, sans doute depuis le sud de l'Océan Indien, et non de Lima)

Moules gingembre yuzu vert

(Photo LOF - Yuzu vert)

Fumiko écrit en "Bon à savoir" après sa "Poêlée de moules gingembre et citron vert" :
« Si vous trouvez du yuzu vert, je vous recommande d’utiliser son jus, à la place du citron vert, car son parfum est frais et très particulier ».
Les yuzus sont encore verts et commencent à être souples et juteux.

Fumiko, d'après son livre

Nous avons testé la recette exacte de Fumiko, telle que la faisait son père (gingembre en poudre, jus de yuzu vert)
Par rapport à notre recette type :
- le gingembre frais est meilleur que le gingembre en poudre, il est très bien en rondelles la première cuisson (pour ouvrir les moules)
- Le yuzu vert gagne à être utilisé et en jus au moment de servir, et aussi mettre ½ yuzu dont on a retiré jus et pépins avec le gingembre, de la sorte le parfum du zeste de yuzu vert est présent.
- le yuzu vert est moins présent que le citron vert, en revanche il apporte une acidité et sa note mandarinée typique, agréable en été.
Notre conclusion n’est pas celle de Fumiko, le citron vert (on parle ici de la lime de Perse) est mieux que le yuzu vert dans cette recette optimale pour les moules.

(Photo LOF - limes)

Aïocho

(Photo LOF - vieux amis)

C’est un ailloli (ou aïoli) fait avec un jaune d’œuf et beaucoup d’huile d’olive puis coupé délicatement de jus de concombre et de tomate.
Le jus de concombre et de tomate s’obtient soit à la centrifugeuse, soit en mixant les deux et en les filtrant finement.
On peut ajouter un peu d’origan.
Le mélange de jus tomate/concombre évoque bien le gaspacho, la sauce aïocho est moins agressive que l’aïoli, et spécialement savoureuse.
Elle se fait au dernier moment et reste d’autant plus ferme que tous les ingrédients sont froids.
Merveille sur le poisson au bouillon et surtout … sur les pommes de terre tièdes.

Steak de pastèque au romarin

(Photo LOF - Steak de pastèque ou stèque de pasteak ?)

Cette recette est américaine, on s’en doute, elle est de l’écrivain Mark Bittmann voir "Barbequed watermelon with rosemary-walnut dukkha", il fait aussi une soupe sur le même thème.
N’étant pas adepte du bbq, instrument difficile à maîtriser et facilement cancérogène, nous servons les steaks de pastèque (5 cm d’épaisseur, conserver la peau sur un côté c’est plus facile à retourner), cuits au grill, comme une côte de bœuf, 5 minutes de chaque côté, l’intérieur doit être chaud.

(Photo LOF - pastèque. Les variété sphériques se prêtent moins bien que la tubulaire Charleston Grey, à une découpe type entrecôte, autrement dit, d'épaisseur constante)

La cuisson se fait sur un lit de romarin, la tranche de pastèque est préalablement huilée.
En fin de cuisson saler (et poivrez si c’est votre habitude)
On peut ajouter une ou deux gouttes de Worcestershire sauce.
La pastèque à utiliser est une pastèque peu juteuse, les tropicales Charleston Grey sont idéales.
C’est étonnant, et bon (et il n'y a pas trop de gras...)

(Photo LOF - Avec la cuisson sur romarin, le jus sucré de la pastèque forme une sorte de caramel au gout de bonne grillade de bœuf)

Gaspacho doux au coing (méthode infusé-cru)

(Photo LOF – coing doux, variété de coing à couteau qui se mange cru)

Pour 3 avec 600 ml d'eau
1 - La garniture :
Dans un petit saladier couper finement
- une tomate pelée épépinée pas trop mure
- un poivron pelé épépiné
- un tronçon de concombre pelé épépiné
Mélanger, réserver au réfrigérateur
2 - L’infusion :
Couper en fines allumettes 1 coing doux mûr dans l’eau (60 cl) faire bouillir l’eau,
la saler, ajouter
2 gousses d’ail écrasée,
un dizaine de fruits de butia mûrs
mettre à rafraîchir et à infuser 2 heures
Filtrer

(Photo LOF - butias)

3 – Servir
Mettre peu de garniture dans les assiettes, verser l’infusion glacée.
Dans cette soupe, les butias donnent une acidité fruitée, si on en a pas utiliser des prunes acidulées (le butia ressemble à une mirabelle acidulée).
Le coing apporte un fruité un rien tannique, en l'absence de coing choisir une pomme fruitée pas trop sucrée.
On peut ajouter un rien de Noilly-Prat ou de Martini Dry dans l’infusion (conseil libre de toute demande de Noilly-Prat) pour évoquer le parfum d’agrume.
Ni vinaigre, ni huile, c’est une soupe douce, pour la pleine chaleur du 15 août.

(Photo LOF - Gaspacho doux au coing)

De son côté Ann préfère la soupe froide de coing aux agrumes suivante :
Garniture : coing doux et blanc de cédrat en petits cubes, chair d'australian finger lime variété verte, jus de citron
Infusion salée 15 minutes : zeste de cédrat, ail, combava, tomate, curcuma en poudre.
Quand nous avons mangé cette soupe les fruits de butia n'étaient pas encore mûrs, il faut noter que ce fruit est acidulé en ce moment, en septembre il sera sucré, les butias donnent des fruits sans arrêt d'aout à décembre.

Thé froid de légumes à la lime

(Photo LOF – Pour ses piqueniques au Lake George, la grand mère d’Ann faisait des bouillons en gelée avec une rondelle de citron)

Rendons à César :
L’idée du thé de légumes chaud est du très créatif chef Jacques Maximin.

Il s'agit d'un thé de légumes secs et non d'une infusion de légumes frais
Il servait du temps du Negresco un thé chaud de légumes au pistou glacé (une glace huile d’olive, ail, basilic).

(Photo LOF - La recette de thé chaud de légumes de Jacques Maximin)

Pour se faire, il séchait et pulvérisait à dose égale carotte, céleri-rave, poireau, navet. Il infusait ces poudres dans une infusette à thé (utiliser les sachet de chez Mariage Frères) dans de l’eau bouillante salée.
Il servait l’infusion (qui ressemble vraiment à un thé breakfast même couleur, même limpidité) en théière, très chaude, on faisait fondre la glace de pistou qui dégageait ses parfums sur le fond d’infusion salée.
Génie que cet homme, le résultat est bien différent des soupes japonaises.

(Photo LOF - Thé de poivron et thé de céleri branche)

Voici une recette pour en ce moment, grande chaleur
Faire une cruche de thé - comme un thé de camelia chinensis - eau bouillante, infuser 10 minutes, de courgette, tomate, aubergine, poivron, céleri branche, oignon jaune.
Le saler un peu.
Laisser refroidir.
Ajouter 1 jus de lime de Tahiti, et une rondelle par verre.
Servir froid avec des glaçons.
Ce thé peut se boire en grande quantité, il est agréable, savoureux, il apporte des sels minéraux indispensable en cas de grosse chaleur.

(Photo LOF - Thé de poivron et thé de céleri branche sur le plateau du déshydrateur)

Thé de légume (1 – la méthode)

Pour sécher les légumes et en faire un thé, il faut un déshydrateur, le four n’est pas adapté et trop énergivore.
Nous utilisons des légumes pas trop mûrs, sauf les aubergines, oignons, les racines qui doivent être à point.

(Photo LOF - Thé d'aubergine)

- La première opération consiste à nettoyer, parfois peler, puis couper ou râper en copeaux.
Plus le légume est riche en eau plus il va réduire.
Il faut donc moduler la taille du copeau en fonction inverse de la richesse en eau :
la tomate, très riche en eau se sèche en gros morceaux non râpés (laisser la peau, retirer les graines) de même pour l’oignon,
le céleri, la carotte, pauvre en eau peuvent être râpés assez fin,
l’aubergine, la courgette - moyennement riches – se râpent plutôt gros.
Le poivron est pelé puis coupé au couteau en morceaux de 1 cm x 1 qui seront petits après séchage, de même le haricot vert se coupe en petits morceaux de 2 cm.

(Photo LOF - Thé de courgette et thé d'aubergine)

- Le temps de séchage est d’environ 10 heures autour de 45° C, ne pas sécher trop chaud

(Photo LOF - Thé d'oignon jaune)

- La seconde opération est le traitement du résidu sec.
Jacques Maximin en faisait des poudres.
La pulvérisation n’est pas nécessaire, l’infusion donne le même résultat en conservant les légumes secs sous la forme brute, comme le thé.
On peut les conserver en sac zip, au congélateur où ils seront au sec.
Le séchage à chaud des légumes en modifie le goût, l’oignon et la tomate notamment acquièrent des saveurs et des parfums balsamique, le goût du céleri est renforcé etc.
Ces thés sont la base d’infusions chaudes ou froides.
Ils interviennent, soit seuls soit comme condiments ou colorants en association avec les légumes frais.
Ils permettent de stocker les légumes en période de forte production du jardin, ce qui est le cas en ce moment.
La dessication en réduit le volume à rien.

(Photo LOF - Thé de tomate et thé d'oignon)

Oignon doux cru

(Photo LOF - oignon rouge moderne Red Baron)

L’Exode, Les Nombres (le peuple de Dieu quitte l’Egypte) constatent qu’il n’est pas facile de changer les habitudes alimentaires des gens même au prix de leur liberté :
la manne d’accord, mais l’oignon d’Egypte manquent au peuple d’Israël traversant le désert.
Le peuple de Dieu avait de bonnes raisons de réclamer des oignons égyptiens.
La migration de l’oignon du nord de l’Iran vers les zones subtropicales du sud égyptien, du Soudan, de l’Ethiopie donne lieu, au 3éme millénaire BC (ou avant), à la création de variétés nouvelles.
Michel Pitrat et Claude Foury dans l’Histoire des légumes (INRA) expliquent que l’adaptation protohistorique de la plante aux jours courts entraîne une nouvelle sélection variétale.
Parmi elles des oignons d’une extrême douceur qui diffuseront en Afrique et qui existent toujours en Egypte où on les consomme cru.

(Photo LOF - Mor Sogan : oignon doux violet truc réputé être un vrai médicament)

Une des variétés égyptiennes « était si excellente qu’elle recevait des hommages comme une divinité » écrit D. Bois, culte qui a perduré jusqu’à il y a peu selon Nerval .
Les arabes les acclimatent dans le sud européen, en Sicile notamment où on en mangeait matin, midi et soir encore au XVIIIéme siècle.

(Photo LOF - la fiche sweet onion de wiki n'existe qu'en trois langues, dont l'italien et oublie complétement la longue histoire de l'oignon doux)

Dans ces conditions, la Manne, toute monothéiste qu’elle soit, était-elle meilleure que l’oignon doux lui-même divinité réclamée démocratiquement ?
Nul ne saura jamais.
L’image d’une tartine d’oignon doux sur le pain du ciel a du traverser l’esprit de certains dans le désert.

Doit-on dégorger l’oignon doux cru ?
Pas pour la salade de tomate, pas pour les œufs durs, ou le thon, à condition de laisser reposer au frais avant de servir.
Un peu s’il se mange comme un condiment avec un pâté, un fromage frais.
Beaucoup si on le sert en tartine.
La durée variera selon l’importance de la note de tête piquante et soufrée.
24 heures donne un oignon doux plus que doux.




Dans quoi le dégorger ?
Eau coupée de vinaigre.
Le Jerez est idéal.
Et aussi eau+vinaigre+mirin afin de donner un peu de sucre.
Trancher l’oignon finement.

Comment le tartiner ?
La tartine est crue, inutile de la toaster,
l’arroser d’huile d’olive,
la couvrir d’oignon,
saler un peu,
et semer des feuilles de menthe coupées en fines lanières.
(verre de vin rouge frais, sud ibérique, lourd, rond)

(Photo LOF - trancher fin)

La diète méditerranéenne est-elle moléculaire ? (Andalucía Sabor 2011)

(Photo andaluciasabor.es)

En ligne le programme du Congrès de Haute Cuisine (20 au 22 septembre à Séville).
Que reste-t-il de la diète méditerranéenne dans les assiettes torturées de la cuisine créative ?
Comment raccrocher au train du concept régime méditerranéen = longue et bonne vie le foisonnement de bizarreries plus ou moins comestibles ?
Innovation dans la couleur de la cuisine marocaine ...
Heureusement, il reste des matières premières d’une qualité exceptionnelle,
et l’innovation, la curiosité, la recherche horticole et gastronomique sont une constante chez les méditerranéens du sud de la péninsule, des Almunias arabes aux avant-gardistes actuels.
Beaucoup de scientifiques, médecins, etc.



Le Concours Meilleur Chef de l'année 2011 "régime méditerranéen" précède une conférence sur « L’intellectualisation de la Méditerranée, un chemin vers sa quintessence »

Graine de nigelle

(Photo LOF - Nigelle sèche, la graine, véritable concurrente de l'aspirine donne du piquant comme un cumin doux et remplace facilement le sel)

Le prophète - qui n’avait pas de labo - dit : « la graine de nigelle apporte remède à toutes les affections sauf la mort ».
Nigella sativa, d'origine proche et moyen orientale, donne une petite graine noire  qui soignerait, sous forme brute ou d’huile au moins 44 de nos maux, 28 selon la fiche wiki en arabe, et bien davantage si on en croit le nombre de publications scientifiques qui la mentionnent ou lui sont consacrée : 992 en 2010, (majoritairement de pays croyants, la nigelle est inconnue en Chine, au Japon, cf les langues de la fiche wiki) .
Sa vocation anticancéreux, antidiabétiques, antihypertenseurs, anti-oxydante etc. est démontrée chez le lapin, le rat et l’homme, elle fait merveille en dermato.
Ibn-al-Awam dit  "à Séville on sème la nigelle [ حبة البركة ] en janvier"
Elle fait ses fleurs en mai, elles sont délicatement découpées et d’un joli pastel.
Il faut la récolter en juin sous nous climats, couper les sommités et les mettre à sécher à l’ombre, un ou deux mois.
Ensuite on les secoue dans un sac pour faire tomber la graine qu’on nettoie au vent.
La graine de nigelle donne une bonne pointe anisée/herbeuse - agréable - au concombre, à la salade de pourpier, aux farces pour les légumes, notamment la courgette, au fromage de chèvre frais... aux tartines beurrées... à la soupe aux lentilles.
Il n’y a pas plus simple à faire en bio en Zéro Pesticide si votre jardin est loin de toute pollution, suffit d’arroser de temps en temps.

(Photo LOF - Les graines noires [cumin noir en arabe], on devrait tous avoir de la nigelle dans le placard, même pour la pâtisserie. Si vous aimez les nigelles bleues, d'un joli bleu pas violet, choisissez la variété "Miss Jekyll Blue")

La Sauce mayoviar

(Photo LOF - Aspic de haricots verts à l'ail et au persil, gelée légumes/Porto blanc sec)

Variante de la rémoulade
qui peut aussi se faire comme une tartare,
la sauce mayoviar est une mayonnaise – vinaigrée et moutardée - additionnée de chair de citron caviar (australian finger lime, citron-doigt) et d’estragon.
Les vésicules de ce petit agrume - piquant et foisonnant - sont solides,
ne dégagent pas de jus,
la mayoviar conserve donc sa tenue, l’estragon vient donner une pointe anisée

(Photo LOF - Sauce mayoviar parfois orthographiée mayoniar, texture gras+croquant)

Le citron caviar est un texturant à la saveur un peu térébenthée, cette sauce croque !,
elle est adaptée aux aspics.




(Photo LOF - Ann aime son aspic en tranches épaisses, il lui évoque une pelouse, tapis stérile introuvable ici sauf dans les golfs, avec le craquement des billes de citron doigt on marche dans l'herbe humide )